Avant guerre, Eugène Varlot s'était frotté à pas mal de petits boulots : mécano, imprimeur, libraire, comédien. Après avoir "fait son devoir" comme tant d'autres pauvres gars embarqués dans la plus grande boucherie de l'Histoire, il se retrouve sur le carreau. Il décide alors de photographier tous les amnésiques rentrés du Front, croupissant dans les asiles, et d'offrir ses services aux familles éplorées qui n'avaient pas vu leurs héros rentrer. Il avait trouvé sa vocation, il serait détective ! Installé en ménage avec la belle Irène qui panse à sa manière les blessures de son âme, il accepte ce qu'il croit n'être au début qu'une enquête de routine sur un banal adultère. Son commanditaire : le colonel Fantin de Larsaudière, de l'héroïque 296ème Régiment, le plus médaillé de toute la guerre. Le colonel gère également la fortune de sa femme et une fabrique de Cognac qui porte son nom. Et Amélie de Larsaudière s'en donne à coeur et à corps joie avec tous les uniformes qui traînent sur son chemin. Mais Varlot va vite s'apercevoir qu'il sert d'alibi à une sordide histoire de chantage autour d'un épisode caché et honteux de la guerre. Entre gueules cassées et vies brisées, la lâcheté et l'ignominie sont une nouvelle fois l'apanage de nantis intouchables qui finiront, bien sûr, par gagner. Quand Tardi lit Le der des ders, paru dans la série noire en 1984, il sait tout de suite que ce roman est pour lui. Tous ses éléments de prédilection y sont réunis : la guerre de 14 bien sûr, mais aussi le Paris des fortifs, des héros malgré eux et une belle brochette de salauds.