Le malaise des enseignants, les difficultés de recrutement ou encore la désillusion des contractuels, autant de thèmes désormais familiers du paysage politico-médiatique comme de la recherche en sciences humaines et sociales, ne sont que les symptômes d’une crise profonde qui affecte nos sociétés – celle de l’éducation –, dans la mesure où elle paraît remettre en cause notre capacité à « prendre soin, préserver et admirer les choses du monde » ainsi que le soulignait Hannah Arendt.
Avec son sixième ouvrage, Nedjib Sidi Moussa propose un récit singulier et sensible, à rebours des plaidoyers lénifiants pour une école postmoderne ou des complaintes anxiogènes sur les territoires abandonnés de la République. Dans ce journal de bord, rédigé à chaud, les lecteurs suivront les pérégrinations d’un professeur contractuel nommé dans un collège de la banlieue parisienne afin d’apprendre aux enfants des classes laborieuses l’histoire et la géographie – sans oublier l’enseignement moral et civique.
En passant du rire aux larmes et de la compassion à la révolte, Le Remplaçant offre une chronique saisissante de la France macronienne. C’est le portrait d’une société déconfinée qui se prépare à réélire un président impopulaire tandis que l’on commémore le soixantième anniversaire de l’indépendance algérienne. Mais ce livre raconte aussi l’histoire d’une jeunesse perdue, celle d’un fils d’ouvrier à l’orée de ses quarante ans, celle d’un ancien sorbonnard durablement installé dans le précariat.