Qui sont-elles, ces femmes mineures enfermées sous le contrôle de l’État dans un centre éducatif en 2023 ou sous le contrôle de l’Église dans un internat du Bon Pasteur en 1957 ? Sara, 15 ans et demi ; Vanessa, 14 ans ; Cindy, 16 ans ; Dakota, 13 ans et demi ; Gisèle, 18 ans. Dans leurs affaires, à la fouille, des écouteurs, des échantillons de parfum, quelques pièces, des mouchoirs, un smartphone ou un Scoubidou. Le quotidien est réglé et les cigarettes sont comptées. Parmi les nombreuses injonctions, la parole des encadrants est tonitruante mais parfois aussi réconfortante. Dans Mauvais genre, Sonia Chiambretto raconte la répression spécifique qui s’exerce sur les jeunes femmes, le poids de la morale sexuelle et de la repentance attendue. Elle entremêle des récits, des confessions, des règlements administratifs, des paroles sous caméras de surveillance ou des voix intérieures libres de toute injonction. « Délinquantes », c’est l’institution qui le dit. Et elles, que font-elles ? Elles rêvent. Elles courent. Elles volent. Elles refusent de signer. Les enceintes sont épaisses, il faut les couper du monde. Mais on finit toujours par trouver un trou dans la haie.