"Lorsque Lou me soulevait du sol, traversait le bar et me jetait au milieu de la rue, je ne savais jamais si c'étaient mes os que j'entendais craquer ou la pellicule de glace qui se brisait sous mon poids. S'il avait neigé, il se produisait une sorte de grincement étouffé et lugubre. D'autres fois, quand les pelles venaient de dégager la chaussée, je faisais comme un oeuf tombant du ciel, je restais étendu, sans bouger, coulant de ma coquille, je regardais les engins s'éloigner et tourner dans Huron Avenue jusqu'à ce que le silence revienne, et je regrettais de ne pas avoir atterri là quelques minutes plus tôt, juste avant leur passage, et de m'être séparé de mon anorak." Philippe Djian.