Le Fils de l’ours père est une œuvre puissante, premier jalon d’une écriture devenue caractéristique de son auteur. En effet, et bien avant son passage à la couleur (Heureux qui comme, Les Jardins de Babylone, La Jungle…), Nicolas Presl y affirme déjà sa préférence pour un récit muet qui cherche ses solutions signifiantes des côtés de la figuration et de la mise-en-scène plutôt que de ceux des dialogues et des récitatifs. On pourrait croire de prime abord à une démarche plus picturale que littéraire. Il n’en est pas moins que les partis pris narratifs sont directement inscrits dans le prolongement de la tragédie antique, socle réactivant la contemporanéité de questionnements tels que la transmission filiale, l’éducation ou la sexualité. Et déjà cet univers graphique tordu, dont on savait la proximité de l’expressionnisme de Grosz ou du Picasso de Guernica, mais dont Le Fils de l’ours père soulève une parenté picturale plus abstraite et plus sombre encore. Pour la 4e édition de ce livre sélectionné au festival d'Angoulême 2011, la fabrication a été rehaussée d'une couverture cartonnée flexible et de gardes au brun profond tel le pelage de l'ours.